L'Itineraire | Interview d’Alain Louvier
919
post-template-default,single,single-post,postid-919,single-format-standard,ajax_leftright,page_not_loaded,,wpb-js-composer js-comp-ver-4.1.2,vc_responsive

25 Mar Interview d’Alain Louvier

 

Comment abordez vous ce concert où vous êtes à la fois compositeur et chef d’orchestre ?

Je le précise souvent : je suis un « compositeur qui sait diriger ». J’ai été un des premiers élèves à la création du 3ème cycle de direction du Conservatoire Supérieur, à l’époque de Manuel Rosenthal, mais j’ai fait le choix de la composition. Lorsque je dirige des concerts, ce qui m’arrive malgré tout régulièrement, c’est souvent dans un but pédagogique. Je considère comme un devoir sacré de jouer les œuvres des jeunes, et ce depuis les années 1970. J’ai été professeur d’orchestration et d’analyse, et il me semble que lorsque les élèves entendent leurs travaux, ils comprennent dans le détail ce qui ne sonne pas et pourquoi. Les grands orchestres ne permettent pas ce travail de précision, souvent faute de répétitions, c’est pourquoi je préfère me consacrer aux étudiants. J’ai essayé de faire en sorte que Boulogne soit un pôle orchestral de haut niveau, et ce grâce à des professeurs de qualité pour chaque pupitre. Ce concert avec l’Itinéraire est une occasion pour les étudiants d’apprendre au contact des musiciens professionnels, mais ce mélange rend ma tâche un peu plus compliquée, surtout pour une œuvre comme celle de Giacinto Scelsi.

A ce propos, pouvez-vous nous dire un mot sur Anahit de Scelsi et sur vos œuvres au programme ?

C’est l’Itinéraire qui a fait connaître Scelsi en France. C’était pourtant une musique inouïe à l’époque ! L’homme était étrange. Lorsque je l’avais rencontré avec Tristan Murail dans son appartement à Rome, il nous avait expliqué que la musique venait des dieux. Son œuvre est très particulière, difficile à interpréter. Mais lorsqu’on réussit, les sons se fondent et le résultat est magique.

Quant à mes compositions, il y a Eclipse, qui a été créée par le quatuor Hélios, et le huitième livre des Etudes pour Agresseurs, qui est un peu mon péché de vieillesse… J’avais écrit le premier livre pour piano en 1964 (j’avais alors dix-huit ans) : pour tous les claviers,  les « agresseurs » seraient les doigts, les poings, les avant-bras, les paumes. En 2011, nous avons renouvelé le parc instrumental de Boulogne avec un magnifique célesta de cinq octaves, et après avoir constaté la quasi-inexistence du  répertoire pour célesta solo j’ai décidé d’écrire un 8ème Livre qui lui serait consacré.

Quels sont vos liens avec l’Ensemble Itinéraire ?

Je l’ai d’abord connu en tant que directeur du Conservatoire de Boulogne, fonctions que j’ai exercées de 1972 à 1986. Nous avons déménagé dans le bâtiment actuel du conservatoire en 1978, et à cette époque l’Itinéraire disposait d’une salle où les musiciens entreposaient leurs équipements électroniques et pouvaient répéter. Je parle là de la génération de Tristan Murail, François Bousch, etc. En échange de cette salle, « l’Ensemble des Instrument Electroniques de l’Itinéraire » faisait des concerts et des animations au conservatoire. J’ai aussi beaucoup dirigé l’Itinéraire, dans les années 1976-1980, et je lui ai écrit deux pièces, Canto di Natale, que je considère comme une de mes œuvres les plus personnelles, et Itinéraires d’outre-rêve (pour l’anniversaire de 1994). J’ai donc connu beaucoup de musiciens de l’Itinéraire, et je pense qu’ils ont tous en commun une attention particulière portée au son. C’est un ensemble très riche en créations.  Il y a là à mon avis une tradition de jouer en particulier une certaine musique française qu’il faut sauvegarder, et pas seulement ce qu’il est convenu d’appeler l’école « spectrale »… D’où ce concert en commun avec le CRR de Boulogne.

No Comments

Sorry, the comment form is closed at this time.